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Jérusalem dans les textes fondateurs des trois religions monothéistes

Un petit groupe de membres éminents de l’AJCF ont étudié la place de Jérusalem dans les textes : Bible hébraïque, Nouveau Testament, Coran.

Ce travail constitue un document de référence très précieux pour comprendre la signification tant historique que symbolique de Jérusalem dans le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam.

 

 Jérusalem dans la Bible hébraïque

Yeroushalayim, Yeroushalem, Shalem, Sion, Ariel, cité de David, « ville de paix », « ville de justice », « ville de sainteté », « ville fidèle », « ville de vérité », « montagne sainte », « ville de Dieu », « la Ville », tels sont les divers noms sous lesquels apparaît Jérusalem dans la Bible hébraïque qui est l’« Ancien Testament » ou le « premier Testament » du christianisme. Selon ce précieux instrument que l’on appelle une concordance biblique, Jérusalem apparaît 667 fois sous ce nom, 154 fois sous le nom de Sion, l’une de ses collines. Si l’on y ajoute les autres mentions, les occurrences de Jérusalem dans les textes canoniques de la Bible approchent ou dépassent le millier.

Dans le Pentateuque

Il faut noter toutefois que Jérusalem n’est pas, ou très peu, présente dans la Torah ou Pentateuque. Rien d’étonnant à cela car le premier des cinq livres, la Genèse, commence à la Création ; il a ensuite pour cadre l’ensemble du Proche-Orient avec les pérégrinations d’Abraham et la descente des fils de Jacob - Israël en Egypte. Les quatre autres livres, Exode, Lévitique, Nombres et Deutéronome, rapportent l’errance des Hébreux dans le désert depuis la sortie d’Egypte jusqu’à l’arrivée en vue de la Terre promise. Dans un bref passage de la Genèse, il est question d’un mystérieux personnage, Melkisedek, « roi de Salem », « prêtre du Dieu Très Haut », qui accueille Abraham avec du pain et du vin et lui donne sa bénédiction. Sur la base du parallèle entre Sion et Salem dans le Psaume 76 verset 3, Salem a été identifiée à Jérusalem, mais l’on ne sait rien de la ville à cette époque archaïque. D’autres passages se réfèrent à Jérusalem de manière allusive. Ainsi, dans le Cantique de la mer (Exode 15.17) où est annoncé l’emplacement du futur Temple :

« Tu les feras entrer pour que tu les plantes
dans la montagne de ton héritage
le lieu dont Tu as fait ton habitation
le sanctuaire que Tu as préparé, Seigneur »

Dans le cinquième livre de la Torah ou Deutéronome, les commandements concernant l’installation des Hébreux en Terre promise mentionnent à plusieurs reprises le lieu que Dieu aura choisi « pour y faire demeurer son nom » (Deut. 12, 4 et 11 ; 14, 23 ; 16, 2, 6, 11 ; 26, 2) autrement dit le Temple à venir, qui devra rester le lieu unique du culte.

Le choix de Jérusalem comme capitale de David

Dans les livres dits « historiques » de la Bible, Jérusalem est bien présente sous son nom. Sans entrer dans le débat de la critique biblique et des archéologues contemporains, nous relèverons ce qui concerne Jérusalem dans le récit biblique et qui, pour des générations, a constitué « l’histoire », en l’absence de tout autre récit. Jérusalem est la cité de David qui en fait sa capitale :

« David était âgé de trente ans à son avènement ; il régna quarante ans. À Hébron, il régna sur Juda sept ans et six mois. À Jérusalem, il régna trente-trois ans sur tout Israël et Juda. Le roi, avec ses hommes, marcha sur Jérusalem contre les Jébuséens, habitants du pays. Ceux-ci dirent à David : « Tu n’entreras pas ici ; les aveugles et les boiteux t’en écarteront », c’est-à-dire : David n’entrera pas ici mais David s’empara de la forteresse de Sion, c’est-à-dire de la Cité de David » (2 Samuel 5, 4-7)

Ce choix s’explique du fait que Jébus constitue une enclave parmi les tribus d’Israël, alors que Hébron est la principale cité de la tribu de Juda à laquelle appartient David. Jérusalem, conquise sur les Jébuséens, se trouve en terrain « neutre ».

« David résida dans la forteresse et l’appela Cité de David. Puis David construisit autour, depuis le Millo jusqu’à l’intérieur » (2 Samuel 5, 9)

David introduit dans sa ville l’Arche sainte (2 Samuel 6, 16-17). Il achète l’aire d’Arawah le Jébuséen (2 Samuel 24, 18-25) en vue d’y édifier un temple digne d’accueillir l’Arche. Tel est un des derniers actes de son règne. C’est à son fils Salomon qu’il sera donné de construire la « Maison du Seigneur ».

Le Temple de Salomon

« Or en l’an quatre cent quatre-vingt après la sortie des fils d’Israël du pays d’Egypte, en la quatrième année du règne de Salomon sur Israël, au mois de Ziv – c’est le second mois - il bâtit la Maison pour l’Eternel. La Maison que le roi Salomon bâtit pour l’Eternel avait soixante coudées de long, vingt de large et trente coudées de haut » (I Rois 6, 1-2).

S’ensuit une description détaillée du Temple construit en matériaux précieux et magnifiquement orné.

« En l’an 4, au mois de Ziv, avait eu lieu la fondation de la Maison du Seigneur. En l’an 11, au mois de Boul, qui est le huitième mois, était terminée la Maison en tous ses détails et suivant tous les plans. On la bâtit en sept ans ». (I Rois 6, 37-38)

L’inauguration se fait par l’introduction de l’Arche d’Alliance dans le sanctuaire, lors de la fête des Cabanes :

« Alors Salomon assembla les anciens d’Israël, tous les chefs des tribus, les princes des maisons paternelles des fils d’Israël, auprès du roi Salomon, à Jérusalem, pour faire monter de la Cité de David, c’est-à-dire Sion, l’Arche de l’Alliance de l’Eternel. Tous les hommes d’Israël s’assemblèrent auprès du roi Salomon, au mois d’Etanim, pendant la Fête – c’est le septième mois. Quand furent arrivés tous les anciens d’Israël, les prêtres enlevèrent l’Arche de l’Eternel, ainsi que la Tente de la Rencontre et tous les objets sacrés qui étaient dans la Tente ; ce furent les prêtres et les lévites qui les firent monter » (I Rois 8, 1-4).

A cette occasion, Salomon rappelle le choix que Dieu a fait de Jérusalem et la mission qui lui a été confiée :

« Le roi se tourna et bénit toute l’assemblée d’Israël, et toute l’assemblée d’Israël se tenait debout. Il dit : « Béni soit l’Eternel, Dieu d’Israël, qui accomplit de sa main ce qu’il avait dit de sa bouche à David, mon père, en ces termes : Depuis le jour où j’ai fait sortir mon peuple, d’Israël, d’Egypte, je n’ai pas choisi de ville parmi toutes les tribus d’Israël pour qu’on y bâtisse une Maison où serait mon nom ; mais j’ai choisi David pour être à la tête de mon peuple Israël. – Or David, mon père, a eu à cœur de bâtir une Maison pour le Nom de l’Eternel, Dieu d’Israël ; mais l’Eternel dit à David, mon père : Tu as eu à cœur de bâtir une Maison pour mon Nom, et tu as bien fait d’avoir cela à cœur. Seulement ce n’est pas toi qui bâtiras la Maison, mais c’est ton fils sorti de tes reins ; c’est lui qui bâtira la Maison pour mon Nom. – L’Eternel a réalisé la parole qu’il avait dite : j’ai succédé à David, mon père, et je me suis assis sur le trône d’Israël, selon ce qu’avait dit l’Eternel ; j’ai bâti la Maison pour le nom de l’Eternel, Dieu d’Israël, et j’y ai assigné une place pour l’arche où se trouve l’alliance de l’Eternel, qu’il a conclue avec nos pères lorsqu’il les fit sortir du pays d’Egypte » (I Rois 8, 14-21).

La notion de « maison », puisque tel est le terme utilisé pour le Temple, suscite la réflexion de Salomon :

« Serait-il donc vrai que Dieu habite sur la terre ? Voici que les cieux et les cieux des cieux ne peuvent te contenir ; combien moins cette Maison que j’ai bâtie ! »

Dans une longue invocation, il demande à Dieu d’accueillir les prières qui monteront de ce lieu :

« Mais tourne-toi vers la prière de ton serviteur et vers sa supplication, l’Eternel mon Dieu, pour entendre le cri et la prière que ton serviteur profère aujourd’hui devant toi. Que nuit et jour tes yeux soient ouverts vers cette Maison, vers le lieu dont tu as dit : Là sera mon Nom – écoute la prière que ton serviteur profèrera vers ce lieu ; écoute la supplication que ton serviteur et ton peuple profèreront vers ce lieu ; toi, écoute au lieu de ta demeure, aux cieux ; écoute et pardonne ! » (I Rois 8, 27-30).

La méditation de Salomon assigne au Temple une centralité universelle :

« Quand l’étranger, qui n’est pas de ton peuple d’Israël, viendra d’un pays lointain, à cause de ton nom, car on saura que ton nom est grand, ta main forte, et ton bras étendu, quand il viendra prier dans cette maison, exauce-le des cieux, du lieu de ta demeure, et accorde à cet étranger tout ce qu’il te demandera, afin que tous les peuples de la terre connaissent ton nom pour te craindre, comme ton peuple d’Israël, et sachent que ton nom est invoqué sur cette maison que j’ai bâtie ! » (I Rois 8, 41-43)

La dévastation et l’exil

Cependant, le livre des Rois rapporte qu’après la mort de Salomon, son royaume se scinde en deux. Le royaume du Sud, celui de Juda, garde Jérusalem comme capitale et donc le Temple, celui du Nord prend pour capitale Samarie et est exposé à l’influence des cultes de la Phénicie voisine. Les prophètes mettent en garde contre l’idolâtrie qui tend à se répandre. Les conquêtes assyrienne (-720) et babylonienne (-597 et -587) sont présentées par eux comme des châtiments divins. C’est notamment le cas de Jérémie qui vit à Jérusalem au moment de l’approche des armées babyloniennes conduites par le roi Nabuchodonosor. Le roi Joïakin est déporté à Babylone avec sa famille et tous les hommes qui travaillent le fer ou sont en état de porter les armes (II Rois 24, 10-16). Dix ans plus tard, Nabuchodonosor revient faire le siège de Jérusalem et incendie la ville et le Temple. Un nouveau contingent de Judéens est emmené à Babylone avec le roi Sédécias, qui a eu les yeux crevés et dont les fils ont été égorgés. Les Lamentations, que la tradition attribue au prophète Jérémie, reflètent la douleur de la population judéenne.

« Comment est-elle assise à l’écart,
La ville populeuse ?
Elle est comme une veuve,
La grande parmi les nations ;
Princesse parmi les provinces,
Elle est soumise à la corvée !
Elle ne cesse de pleurer la nuit
Est ses larmes coulent sur ses joues.
Elle n’a personne qui la console,
De tous ceux qui l’aimaient ;
Tous ses amis l’ont trahie,
Ils sont devenus ses ennemis. » (Lamentations 1,1-2).

« Est-ce bien la ville qu’on disait beauté parfaite, joie pour tout le pays ? » (Lamentations 2, 15)

Jérémie est celui qui a prédit la catastrophe :

« Et je ferai disparaître des villes de Juda et des rues de Jérusalem le cri de réjouissance et le cri d’allégresse, le chant du fiancé et le chant de la fiancée, car le pays deviendra une ruine » (Jérémie 7, 34).

Mais à ses yeux, elle ne saurait être définitive. Le même prophète annonce pour bientôt le pardon divin et le retour à Jérusalem. Après la menace viendra la consolation avec le retour à l’ordre antérieur dans Jérusalem pardonnée :

« Cette ville sera pour moi un sujet de joie, de louange et de gloire, Parmi toutes les nations de la terre, qui apprendront tout le bien que je leur ferai ; elles seront étonnées et émues de tout le bonheur et de toute la prospérité que je leur accorderai. Ainsi parle l’Eternel : On entendra encore dans ce lieu dont vous dites : Il est désert, il n’y a plus d’hommes, plus de bêtes. On entendra dans les villes de Juda et dans les rues de Jérusalem, dévastées, privées d’hommes, d’habitants, de bêtes, les cris de réjouissance et les cris d’allégresse, Les chants du fiancé et les chants de la fiancée » (Jérémie 33, 9-11)

La nostalgie et le retour

La nostalgie des exilés à Babylone s’exprime dans le célèbre Psaume 137 :

« Près des fleuves de Babel,
Là nous étions assis et pleurions
En nous souvenant de Sion.
Aux saules qui s’y trouvent
Nous avions suspendu nos lyres.
C’est là que nos geôliers
Nous demandaient les paroles d’un cantique,
Et nos ravisseurs de la joie :
« Chantez-nous, disaient-ils,
Un cantique de Sion. »
Comment chanterions-nous
Le cantique de l’Éternel
Sur un sol étranger ?
Si jamais je t’oublie, Jérusalem,
Que ma droite se dessèche ;
Que ma langue colle à mon palais,
Si de toi je n’ai souvenance,
Si je n’élève Jérusalem
Au faîte de ma joie ! » (Psaume 137, 1-6)

Le prophète Ezéchiel avait aussi prédit en termes violents le châtiment de la ville pécheresse, mais lui aussi a l’assurance du pardon divin. De son exil babylonien, il annonce dans sa célèbre vision des ossements desséchés (chapitre 37) le retour des exilés. De même que ces ossements se couvriront de chair et de peau et redeviendront des êtres vivants, de même Jérusalem ressuscitera en retrouvant ses enfants. Par sa voix, Dieu promet :

« Je conclurai avec eux une alliance de paix, ce sera une alliance perpétuelle ; je les établirai et les multiplierai et je mettrai mon sanctuaire au milieu d’eux pour toujours » (Ezéchiel 37, 26)

L’histoire vient répondre à l’attente des exilés lorsque Cyrus, roi de Perse (-559-529) s’empare de la Babylonie et autorise tous ceux qui le voudront à rentrer dans leur pays (-538) :

« Ainsi parle Cyrus, roi de Perse : l’Eternel, le Dieu du ciel, m’a donné tous les royaumes de la terre, et lui-même m’a chargé de lui bâtir une Maison à Jérusalem qui est en Juda. Quiconque parmi vous est de son peuple que son Dieu soit avec lui, qu’il monte à Jérusalem qui est en Juda, et bâtisse la Maison de l’Eternel, Dieu d’Israël ; c’est le Dieu qui est à Jérusalem. Et à tous ceux qui restent, en quelque lieu qu’ils résident, que les gens de l’endroit prêtent leur concours en argent, en or, en biens et en bétail, ainsi qu’en offrandes volontaires pour la Maison du Dieu qui est à Jérusalem » (Esdras 1, 2-4).

Celui que l’on appelle « le second Isaïe » et qui est aussi un prophète en exil, assigne un rôle providentiel à Cyrus :

« Moi qui dis de Cyrus : « Mon berger !
Il fera aboutir toute ma volonté »,
En disant de Jérusalem : « Qu’elle soit rebâtie ! »
Et du Temple : « Tu seras rétabli ! » (Isaïe 44, 28).
De ce fait, Cyrus mérite d’être appelé mashiah, « Oint » du Seigneur
(Isaïe 45, 1)

Ce prophète est celui de la consolation. Il annonce le pardon divin en des termes poétiques repris de nos jours dans la liturgie synagogale :

« Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu ; parlez au cœur de Jérusalem et criez-lui que son temps de service est accompli, que sa faute est payée, qu’elle a reçu de la main de l’Éternel le double pour tous ses péchés » (Isaïe 40, 2).

La joie du retour

La joie du retour s’exprime dans le Psaume 126 :

« Quand l’Éternel ramena les captifs de Sion,
Nous étions comme en rêve ;
Alors notre bouche était pleine de rires,
Notre langue de cris de joie ;
Alors on disait parmi les nations :
« L’Éternel a fait pour eux de grandes choses ! »
L’Éternel a fait pour nous de grandes choses :
Nous étions dans la joie.
Ramène, Éternel, nos captifs,
Comme les torrents du Néguev.
Ceux qui sèment dans les larmes
Moissonnent dans la joie ;
On s’en va, on s’en va tout en pleurs,
Portant et jetant la semence ;
On s’en vient, on s’en vient avec des cris de joie,
En portant ses gerbes. » (Psaume 126, 1-6)

Le prophète Zacharie, contemporain du retour, est le témoin de la reconstruction du Temple et de Jérusalem :

« C’est pourquoi, ainsi parle l’Éternel : Je suis revenu à Jérusalem avec pitié ; ma Maison y sera rebâtie – oracle de l’Éternel - et le cordeau sera tendu sur Jérusalem » (Zacharie 1, 16)

Les exilés rentrés au pays obtiennent en effet le droit de bâtir « la maison de Dieu qui est à Jérusalem » (Esdras 5, 2)et de récupérer les objets sacrés emportés par le conquérant babylonien. Le projet de reconstruction suscite la méfiance des satrapes locaux, mais Darius confirme l’édit de Cyrus :

« Et les anciens des Juifs construisirent avec succès, selon la prophétie d’Aggée le prophète et de Zacharie fils d’Iddo...et ils achevèrent cette maison au troisième jour d’Adar, la sixième année du règne de Darius » (Esdras 6,14)

Quant à la ville, restée dévastée par le feu, elle est progressivement reconstruite malgré l’opposition de populations voisines dont témoigne le livre de Néhémie.

Le retour des exilés et la reconstruction de la ville et du Temple sont pour les fidèles, les signes du pardon divin :

« Sion disait : « L’Éternel m’a abandonnée, le seigneur m’a oubliée »
Une femme oublie-t-elle l’enfant qu’elle nourrit ? Cesse-t-elle d’avoir pitié du fils de ses entrailles ? Même si celles-là oubliaient, moi, je ne t’oublierai pas ! Vois, je t’ai gravée sur mes paumes, tes remparts sont devant moi constamment. Tes bâtisseurs se hâtent, tes démolisseurs et tes ravageurs sortent de chez toi. Lève les yeux alentour et vois : tous se rassemblent, ils viennent vers toi. Par ma vie – oracle de l’Eternel – d’eux tous tu te vêtiras comme d’une parure, tu te ceindras d’eux comme une épousée. Car tes ruines, tes lieux désolés et ton pays détruit seront désormais trop étroits pour tes habitants, et ceux qui te dévoraient seront loin ! » (Isaïe 49, 14-19)

« Porte tes yeux alentour, et regarde : tous ils s’assemblent, ils viennent vers toi ; tes fils arrivent de loin, et tes filles sont portées sur les bras. »
(Isaïe, 60, 3-4)

Pour le prophète témoin du retour, l’heure de la consolation est arrivée :

« Réjouissez-vous avec Jérusalem, faites d’elle le sujet de votre allégresse, vous tous qui l’aimez. Tressaillez avec elle de joie, vous tous qui menez deuil sur elle ; afin que vous soyez nourris et rassasiés du lait de ses consolations, afin que vous savouriez avec bonheur la plénitude de sa gloire. Car ainsi parle l’Eternel : Voici, je dirigerai vers elle la paix comme un fleuve... Comme un homme que sa mère console, ainsi je vous consolerai ; vous serez consolés dans Jérusalem. » (Isaïe 66, 10-13)

La ville rebâtie et repeuplée renaît à la vie :

« Secoue ta poussière, lève-toi, mets-toi sur ton séant, Jérusalem ! Détache les liens de ton cou, captive, fille de Sion ! « (Isaïe, 52, 2)

« Qu’ils sont beaux sur les montagnes, les pieds de celui qui apporte de bonnes nouvelles, qui publie la paix ! De celui qui apporte de bonnes nouvelles, qui publie le salut ! De celui qui dit à Sion : ton Dieu règne ! La voix de tes sentinelles retentit ; elles élèvent la voix, elles poussent ensemble des cris d’allégresse ; car de leurs propres yeux elles voient que l’Eternel ramène Sion. Eclatez ensemble en cris de joie, ruines de Jérusalem ! Car l’Eternel console son peuple, Il rachète Jérusalem. » (Isaïe 52, 7-9)

Zacharie lui promet qu’elle retrouvera la sécurité grâce à la protection divine :

« En ce jour-là, l’Eternel protégera les habitants de Jérusalem, et celui qui parmi eux chancelait sera, en ce jour-là, comme David, et la maison de David sera comme Dieu, comme l’Ange de l’Eternel devant eux »
(Zacharie 12, 8)

Et le psalmiste chante Dieu qui « rebâtit Jérusalem, rassemble les exilés d’Israël, guérit ceux qui ont le cœur brisé et panse leurs blessures » (Psaume 147, 2-3)

Jérusalem, Ville sainte

En conclusion de la longue description qu’Ézéchiel consacre à la vision de Jérusalem rebâtie (chapitres 44-48), il révèle son nouveau nom :

« Et le nom de la ville sera à partir de ce jour : Dieu est là » (Ez. 48, 35)

Zacharie se réjouit du retour de Dieu à Sion, sa montagne sainte :

« Ainsi parle l’Éternel :
Je suis revenu vers Sion
Et je demeurerai au milieu de Jérusalem ;
Jérusalem sera appelée « Ville-de-la-fidélité »,
Et la montagne de l’Éternel « Montagne sainte ». (Zacharie 8, 3)

Il affirme encore :« Jérusalem s’appellera ville de sainteté » (Zacharie ***).
De la « montagne sainte » où est situé le Temple, la sainteté s’est étendue à toute la ville. C’est ainsi que l’interpelle le second Isaïe (52, 1) :

« Réveille-toi, réveille-toi
revêts-toi de force, Sion
revêts tes habits les plus magnifiques
Jérusalem, ville sainte »

Pour les exilés qui rentrent de Babylone, « ville sainte » est un autre nom de Jérusalem (Néhémie 11, 1 et 18)

A travers les Psaumes chantés par des générations successives, Sion, la « montagne sainte » est reconnue comme la résidence divine sur terre (Psaumes 2,6 ; 10,12 ; 15,1 ; 20,3 ; 27,4 ; 29,9 ; 132,13 ; 133,3 ; 134,3 ; 135,19-21 ; 147,12-14).

La Ville sainte baigne dans la lumière divine :

« Lève-toi, sois éclairée, car ta lumière arrive, Et la gloire de l’Eternel se lève sur toi. Des nations marchent à ta lumière, Et des rois à la clarté de tes rayons. » (Isaïe 60, 1 et 3)

L’amour de Dieu pour Sion

Jérusalem, « la fille de Sion, » continuera d’être l’objet de l’amour divin :

« Voici ce que l’Éternel proclame aux extrémités de la terre : Dites à la fille de Sion : Voici, ton salut arrive ; voici avec lui son salaire et devant lui sa récompense. On les appellera « peuple saint », « rachetés de l’Éternel » et toi, on t’appellera « recherchée », « ville non délaissée. » (Isaïe 62, 11-12)

L’amour de Dieu rehaussera la splendeur de la Ville rebâtie, c’est ce qu’annonce le prophète Isaïe dans une célèbre vision qui sera interprétée plus tard comme celle de la Jérusalem céleste. Cette splendeur devra être méritée par la pratique de la justice chez ses habitants :

« Malheureuse, battue de la tempête, et que nul ne console ! Voici, je garnirai tes pierres d’antimoine, et je te donnerai des fondements de saphir ; je ferai tes créneaux de rubis, tes portes d’escarboucles, et toute ton enceinte de pierres précieuses. Tous tes fils seront disciples de l’Eternel, et grande sera la prospérité de tes fils. Tu seras affermie par la justice. Bannis l’inquiétude, car tu n’as rien à craindre, et la frayeur, car elle n’approchera pas de toi. » (Isaïe 54, 11-14)

Il y aura une sorte d’épousailles mystiques entre Dieu et Sa ville sainte :

« Pour l’amour de Sion je ne me tairai point, pour l’amour de Jérusalem je ne prendrai point de repos, jusqu’à ce que son salut paraisse, comme l’aurore, et sa délivrance, comme un flambeau qui s’allume. Alors les nations verront ton salut, et tous les rois ta gloire ; et l’on t’appellera d’un nom nouveau, que la bouche de l’Éternel déterminera. Tu seras une couronne éclatante dans la main de l’Éternel, un turban royal dans la main de ton Dieu. On ne te nommera plus délaissée, on ne nommera plus ta terre désolation ; mais on t’appellera mon plaisir en elle, et l’on appellera ta terre épouse ; car l’Éternel met son plaisir en toi, et ta terre aura un époux. Comme un jeune homme s’unit à une vierge, ainsi tes fils s’uniront à toi ; et comme la fiancée fait la joie de son fiancé, ainsi tu feras la joie de ton Dieu. » (Isaïe 62, 1-5)

Promesse de bonheur et de paix universelle

Zacharie prédit pour Jérusalem qui a retrouvé ses enfants une ère de paix. Les générations y coexisteront dans une atmosphère de bonheur tranquille :

« Ainsi parle l’Éternel :
Les vieux et des vieilles s’assiéront encore sur les places de Jérusalem,
Et chacun sa canne à la main
À cause du nombre de ses jours.
Et les places de la ville seront remplies
De garçonnets et de fillettes
Jouant sur ses places. » (Zacharie 8, 3-5)

Isaïe promet aux habitants de Jérusalem la fin de tous les maux qui accablent l’humanité :

« Je ferai de Jérusalem mon allégresse, et de mon peuple ma joie. On n’y entendra plus le bruit des pleurs et le bruit des cris. Il n’y aura plus là de nourrisson vivant quelques jours ni de vieillard qui n’accomplisse pas ses jours ; car le plus jeune mourra âgé de cent ans et celui qui ne parviendra pas à cent ans aura été maudit. Ils bâtiront des maisons et les habiteront ; ils planteront des vignes et en mangeront le fruit. Ils ne bâtiront pas des maisons pour qu’un autre les habite, ils ne planteront pas des vignes pour qu’un autre en mange le fruit ; car les jours de mon peuple seront comme les jours des arbres, et mes élus jouiront de l’œuvre de leurs mains. Ils ne travailleront pas en vain, et ils n’auront pas des enfants pour les voir périr ; car ils formeront une race bénie de l’Éternel, et leurs enfants seront avec eux. »

Mieux encore, il laisse entrevoir le retour au bonheur du Jardin d’Eden :

« Avant qu’ils m’invoquent, je répondrai ; avant qu’ils aient cessé de parler, j’exaucerai. Le loup et l’agneau paîtront ensemble, le lion, comme le bœuf, mangera de la paille, et le serpent aura la poussière pour nourriture. Il ne se fera ni tort ni dommage sur toute ma montagne sainte, dit l’Éternel. »
(Isaïe 65, 19-25)

Isaïe, fils d’Amots, n’avait-il pas prophétisé la vocation universelle de Jérusalem :

« Il arrivera, dans la suite des temps, que la montagne de la maison de l’Éternel sera fondée sur le sommet des montagnes, qu’elle s’élèvera par-dessus les collines, et que toutes les nations y afflueront. Des peuples s’y rendront en foule, et diront : Venez, et montons à la montagne de l’Éternel, à la maison du Dieu de Jacob, afin qu’il nous enseigne ses voies, et que nous marchions dans ses sentiers. Car de Sion sortira la loi, et de Jérusalem la parole de l’Éternel. » (Isaïe 2, 1-3)

Les Psaumes, qui sont depuis l’Antiquité partie intégrante de la liturgie juive et chrétienne, contribuent à entretenir l’espérance que fait briller le seul nom de Jérusalem :

« Demandez la paix pour Jérusalem !
Que soient tranquilles ceux qui t’aiment
que la paix soit dans tes murs
A cause de mes frères et de mes amis
je me plais à dire : « Paix sur toi ! »
A cause de la Maison de l’Eternel, notre Dieu,
je réclame pour toi le bonheur ».(Ps. 122, 6-9)
« Que l’Eternel te bénisse de Sion
puisses-tu voir le bonheur de Jérusalem
tous les jours de ta vie ! » (Ps. 128, 5)

 Jérusalem dans le Nouveau Testament

« Jérusalem, avant même d’être la ville de Jésus, le Rédempteur, a été le lieu historique de la révélation biblique de Dieu, le point où, plus qu’en tout autre lieu, se noue le dialogue entre Dieu et les hommes, comme le point de rencontre entre la terre et le ciel. [1] »
Cette citation du Pape Jean-Paul II est explicite sur le lien avec Jérusalem du chrétien en raison de sa place dans la vie de Jésus, l’accomplissement de la Rédemption dans la continuité de la révélation biblique. La relation du chrétien à Jérusalem tient donc au rapport de Jésus avec cette ville, mais en raison de l’enracinement de Jésus dans son peuple et du lien de celui-ci avec Jérusalem, le lieu où Dieu a choisi de faire demeurer son nom (cf Dt 26,2).

I Lieu d’enracinement et d’accomplissement de la vie de Jésus

Jérusalem est le lieu de l’enracinement de la vie de Jésus. Au commencement, ses parents accomplissent le rite du rachat du premier-né, comme le rapporte S. Luc et c’est bien sûr, conformément à la Loi, au Temple que se déroule ce rite :

« Et lorsque furent accomplis les jours pour leur purification, selon la Loi de Moïse, ils l’emmenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, ... » (Lc 2, 22 )

C’est au cours de ce rite que l’évangéliste nous rapporte la rencontre de Marie, Joseph et leur nouveau-né, avec les figures de Syméon et d’Anne, liées à Jérusalem :

« Et voici qu’il y avait à Jérusalem un homme du nom de Syméon. Cet homme était juste et pieux ; il attendait la consolation d’Israël et l’Esprit Saint reposait sur lui. » (Lc 2,25)

« Survenant à cette heure même, elle louait Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem. Et quand ils eurent accompli tout ce qui était conforme à la Loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, à Nazareth, leur ville. » (Lc 2,38-39)

Comme tous les juifs pieux, la sainte famille se rend à Jérusalem pour les fêtes de pèlerinage et c’est au cours de l’un deux que Jésus se dérobe à la surveillance de ses parents pour discuter au Temple avec les autorités religieuses :

« Ses parents se rendaient chaque année à Jérusalem pour la fête de la Pâque. Et lorsqu’il eut douze ans, ils y montèrent, comme c’était la coutume pour la fête. Une fois les jours écoulés, alors qu’ils s’en retournaient, l’enfant Jésus resta à Jérusalem à l’insu de ses parents. Le croyant dans la caravane, ils firent une journée de chemin, puis ils se mirent à le rechercher parmi leurs parents et connaissances. Ne l’ayant pas trouvé, ils revinrent, toujours à sa recherche, à Jérusalem. Et il advint, au bout de trois jours, qu’ils le trouvèrent dans le Temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant ; et tous ceux qui l’entendaient étaient stupéfaits de son intelligence et de ses réponses. À sa vue, ils furent saisis d’émotion, et sa mère lui dit : " Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois ! ton père et moi, nous te cherchons, angoissés. " Et il leur dit : " Pourquoi donc me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père ? " (Lc 2,41-49)

Après les années de vie cachée passées à Nazareth, Jésus inaugure son ministère public, en tête duquel l’évangéliste place le récit de la tentation de Jésus. L’une d’entre elles se déroule au Temple de Jérusalem :

« Puis il le mena à Jérusalem, le plaça sur le pinacle du Temple et lui dit : " Si tu es Fils de Dieu, jette-toi d’ici en bas ; » (Lc 4, 9)

La place de Jérusalem dans le ministère de Jésus n’est pas la même suivant les évangélistes. Dans les synoptiques, Jérusalem est présente comme le lieu de l’accomplissement de la mission de Jésus : c’est le lieu de l’entrée triomphale, de la Passion et de la résurrection, et pour Luc de l’Ascension. Dans l’évangile de S. Jean nous avons plusieurs séjours de Jésus à Jérusalem.

Les textes nous mentionnent surtout la rencontre de Jésus avec les habitants de Jérusalem, car les foules viennent à lui :

« Des foules nombreuses se mirent à le suivre, de la Galilée, de la Décapole, de Jérusalem, de la Judée et de la Transjordane. » (Mth 4, 25)

« Jésus avec ses disciples se retira vers la mer et une grande multitude le suivit de la Galilée et de la Judée, de Jérusalem, de l’Idumée, de la Transjordane, des environs de Tyr et de Sidon, une grande multitude, ayant entendu tout ce qu’il faisait, vint à lui. » (Mc 3, 7-8)

« Et il advint, un jour qu’il était en train d’enseigner, qu’il y avait, assis, des Pharisiens et des docteurs de la Loi venus de tous les villages de Galilée, de Judée, et de Jérusalem ; et la puissance du Seigneur lui faisait opérer des guérisons. » (Lc 5, 17)

Tout comme elles allaient à Jean-Baptiste :

« Et s’en allaient vers lui tout le pays de Judée et tous les habitants de Jérusalem, et ils se faisaient baptiser par lui dans les eaux du Jourdain, en confessant leurs péchés. » (Mc 1, 5)

« Et voici quel fut le témoignage de Jean, quand les Juifs lui envoyèrent de Jérusalem des prêtres et des lévites pour lui demander : " Qui es-tu ? " » (Jn 1, 19)

Des actes de son ministère à Jérusalem, les synoptiques nous relatent l’épisode des marchands chassés du Temple. Il s’agit d’ailleurs du seul acte de violence qui nous soit relaté. Sa localisation précise et son interprétation suscitent beaucoup de théories.

« Ils arrivent à Jérusalem. Étant entré dans le Temple, il se mit à chasser les vendeurs et les acheteurs qui s’y trouvaient : il culbuta les tables des changeurs et les sièges des marchands de colombes, et il ne laissait personne transporter d’objet à travers le Temple. » (Mc 11, 15-16)

Jésus est alors confronté aux interrogations des autorités :

« Ils viennent de nouveau à Jérusalem. Et tandis qu’il circule dans le Temple, les grands prêtres, les scribes et les anciens viennent à lui et ils lui disaient : " Par quelle autorité fais-tu cela ? ou qui t’a donné cette autorité pour le faire ? " » (Mc11, 27-28)

S. Jean dans son évangile mentionne plusieurs montées de Jésus à Jérusalem :

« La Pâque des Juifs était proche et Jésus monta à Jérusalem. » (Jn 2, 13)
« Comme il était à Jérusalem durant la fête de la Pâque, beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu’il faisait. » (Jn2, 23)

« Après cela, il y eut une fête des Juifs et Jésus monta à Jérusalem. Or il existe à Jérusalem, près de la Probatique, une piscine qui s’appelle en hébreu Bethesda et qui a cinq portiques. » (5, 1-2)

« Il y eut alors la fête de la Dédicace à Jérusalem. C’était l’hiver. Jésus allait et venait dans le Temple sous le portique de Salomon. » (Jn 10, 22-23)

suscitant dans la ville, les commentaires à son égard :

« Certains, des gens de Jérusalem, disaient : " N’est-ce pas lui qu’ils cherchent à tuer ? » (Jn7, 25)

Enfin c’est dans la banlieue de Jérusalem que se situe la résurrection de Lazare :

« Béthanie était près de Jérusalem, distant d’environ quinze stades, et beaucoup d’entre les Juifs étaient venus auprès de Marthe et de Marie pour les consoler au sujet de leur frère. » (Jn 11, 18-19)

Jérusalem apparaît également dans l’enseignement de Jésus qui connait sa place dans la tradition et les mœurs de son peuple :

« Eh bien ! moi je vous dis de ne pas jurer du tout : ni par le Ciel, car c’est le trône de Dieu ; ni par la Terre, car c’est l’escabeau de ses pieds ; ni par Jérusalem, car c’est la Ville du grand Roi. » (Mtt 5, 34-35)

Dans la parabole du bon Samaritain :

« Jésus reprit : " Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba au milieu de brigands qui, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en rallèrent, le laissant à demi mort. » (Lc 10, 30)

ou encore dans l’échange avec la Samaritaine

« Nos pères ont adoré sur cette montagne et vous, vous dites : C’est à Jérusalem qu’est le lieu où il faut adorer. « Jésus lui dit : " Crois-moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. » (Jn 4, 20-21)

Il prie aussi pour Jérusalem :

« Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants à la manière dont une poule rassemble ses poussins sous ses ailes..., et vous n’avez pas voulu ! Voici que votre maison va vous être laissée déserte. » (Mth 23,37-38)

Pour les chrétiens, Jérusalem prend une valeur particulière, puisqu’elle est le lieu de l’ultime accomplissement de l’œuvre de salut, par la passion, la mort et la résurrection qui s’y réalisent.

« À dater de ce jour, Jésus commença de montrer à ses disciples qu’il lui fallait s’en aller à Jérusalem, y souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, être tué et, le troisième jour, ressusciter. » (Mt 16,21)

« Devant monter à Jérusalem, Jésus prit avec lui les Douze en particulier et leur dit pendant la route : " Voici que nous montons à Jérusalem, et le Fils de l’homme sera livré aux grands prêtres et aux scribes ; ils le condamneront à mort. » (Mth 20, 17-18)

Cette place particulière est marquée avec insistance par l’évangéliste Luc qui parle de la montée de Jésus à Jérusalem :

« Et voici que deux hommes s’entretenaient avec lui : c’étaient Moïse et Élie qui, apparus en gloire, parlaient de son départ qu’il allait accomplir à Jérusalem. » (Lc 9,30-31)

« Or il advint, comme s’accomplissait le temps où il devait être enlevé, qu’il prit résolument le chemin de Jérusalem et envoya des messagers en avant de lui. S’étant mis en route, ils entrèrent dans un village samaritain pour tout lui préparer. Mais on ne le reçut pas, parce qu’il faisait route vers Jérusalem. » (Lc 9, 51-53)

Montrant bien l’enracinement de son œuvre, il affirme la réalisation des paroles annoncées par l’Écriture :

« Prenant avec lui les Douze, il leur dit : " Voici que nous montons à Jérusalem et que s’accomplira tout ce qui a été écrit par les Prophètes pour le Fils de l’homme. » (Lc 18, 31)

Puis c’est son entrée triomphale

« Quand il entra dans Jérusalem, toute la ville fut agitée. " Qui est-ce ? " disait-on, et les foules disaient : " C’est le prophète Jésus, de Nazareth en Galilée. " » (Mth 21, 10-11)

Ensuite toute la passion de Jésus se déroule à Jérusalem, sans que cela soit mentionné spécialement, sinon au sujet de la présence d’Hérode, auquel Jésus est envoyé par Pilate, selon Luc :

« Et s’étant assuré qu’il était de la juridiction d’Hérode, il le renvoya à Hérode qui se trouvait, lui aussi, à Jérusalem en ces jours-là. » (Lc 23, 7)

Un peu plus loin, le même évangéliste place les paroles de Jésus, sous forme de prophéties, à des femmes qui se lamentent :

« Mais, se retournant vers elles, Jésus dit : " Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants ! Car voici venir des jours où l’on dira : Heureuses les femmes stériles, les entrailles qui n’ont pas enfanté, et les seins qui n’ont pas nourri ! Alors on se mettra à dire aux montagnes : Tombez sur nous ! Et aux collines : Couvrez-nous ! Car si l’on traite ainsi le bois vert, qu’adviendra-t-il du sec ? " » (Lc 23, 28-31)

Tout comme Luc a mis en valeur la montée à Jérusalem, la cité sainte apparaît plusieurs fois dans les récits d’apparition et c’est également là qu’il situe l’Ascension de Jésus.
Comme le mentionne Paul dans son discours dans la synagogue d’Antioche :

« Mais Dieu l’a ressuscité ; pendant de nombreux jours, il est apparu à ceux qui étaient montés avec lui de Galilée à Jérusalem, ceux-là mêmes qui sont maintenant ses témoins auprès du peuple. » (Ac 13, 31)

« Et voici que, ce même jour, deux d’entre eux faisaient route vers un village du nom d’Emmaüs, distant de Jérusalem de soixante stades, …/... Prenant la parole, l’un d’eux, nommé Cléophas, lui dit : " Tu es bien le seul habitant de Jérusalem à ignorer ce qui y est arrivé ces jours-ci ! " …/... À cette heure même, ils partirent et s’en retournèrent à Jérusalem. Ils trouvèrent réunis les Onze et leurs compagnons, » (Lc 24, 13...28)

Avant l’Ascension, dans le texte des Actes de Apôtres, Luc place l’ordre de Jésus d’attendre le don du Saint Esprit, à Jérusalem, pour y devenir ses témoins :

« Alors, au cours d’un repas qu’il partageait avec eux, il leur enjoignit de ne pas s’éloigner de Jérusalem, mais d’y attendre ce que le Père avait promis, " ce que, dit-il, vous avez entendu de ma bouche : Jean, lui, a baptisé avec de l’eau, mais vous, c’est dans l’Esprit Saint que vous serez baptisés sous peu de jours. " » (Ac 1, 4-5)

« Mais vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Ac 1,8)

Après l’Ascension les disciples retournent à Jérusalem, là va commencer la prédication apostolique mais en attendant, comme tout juif pieux, ils prient au Temple.

« Pour eux, s’étant prosternés devant lui, ils retournèrent à Jérusalem en grande joie, et ils étaient constamment dans le Temple à bénir Dieu. » (Ac 1,52-53)

Il s’agit donc du point germinal de l’Église. C’est le troisième point d’attache des chrétiens avec Jérusalem. On constate donc que, quel que soit les choix des évangélistes, la ville Jérusalem et le Temple sont bien présent dans la vie de Jésus, à la fois dans la place qu’ils tiennent dans la vie de tout juif de l’époque et dans un rapport unique durant son ministère et l’accomplissement de sa mission.

II. Jérusalem point germinal de la prédication apostolique

L’Église naît à Jérusalem au jour de la Pentecôte (shavouot), avec la prédication de Pierre, après qu’il ait reçu le Saint Esprit :

« Or il y avait, demeurant à Jérusalem, des hommes dévots de toutes les nations qui sont sous le ciel. » (Ac 2,5)

« Pierre alors, debout avec les Onze, éleva la voix et leur adressa ces mots :
"Hommes de Judée et vous tous qui résidez à Jérusalem, apprenez ceci, prêtez l’oreille à mes paroles. " » (Ac 2, 14)

Alors, Jérusalem devient le point de départ du rayonnement de la prédication des apôtres et de l’expansion missionnaire :

« Apprenant que la Samarie avait accueilli la parole de Dieu, les apôtres qui étaient à Jérusalem y envoyèrent Pierre et Jean. » (Ac 8,14)

« Pour eux, après avoir rendu témoignage et annoncé la parole du Seigneur, ils retournèrent à Jérusalem en évangélisant de nombreux villages samaritains. » (Ac 8,25)

« Quant à Barnabé et Saul, après avoir accompli leur ministère à Jérusalem, ils revinrent, ramenant avec eux Jean, surnommé Marc. » (Ac 12,25)

Le succès de la prédication et la croissance de la communauté des croyants en Jésus s’accompagnent de la confrontation avec les autorités et de persécutions :

« Et la parole du Seigneur croissait ; le nombre des disciples augmentait considérablement à Jérusalem, et une multitude de prêtres obéissaient à la foi. » (Ac 6,7)

« Le lendemain les chefs des Juifs, les anciens et les scribes se rassemblèrent à Jérusalem…. Ils disaient : " Qu’allons-nous faire à ces gens-là ? Qu’un signe notoire ait été opéré par eux, c’est trop clair pour tous les habitants de Jérusalem, et nous ne pouvons le nier. Mais pour que cela ne se répande pas davantage dans le peuple, empêchons-les par des menaces de parler désormais à qui que ce soit en ce nom-là. " » (Ac 4, 5….17)

" Nous vous avions formellement interdit d’enseigner en ce nom-là. Or voici que vous avez rempli Jérusalem de votre doctrine ! Vous voulez ainsi faire retomber sur nous le sang de cet homme-là ! " (Ac 5, 28)

« Cependant Saul, ne respirant toujours que menaces et carnage à l’égard des disciples du Seigneur, alla trouver le grand prêtre et lui demanda des lettres pour les synagogues de Damas, afin que, s’il y trouvait quelques adeptes de la Voie, hommes ou femmes, il les amenât enchaînés à Jérusalem. » (Ac 9,1-2)

Jérusalem, comme communauté première, demeure le lieu de référence pour les autres communautés chrétiennes qui naissent :

« La nouvelle en vint aux oreilles de l’Église de Jérusalem, et l’on députa Barnabé à Antioche. » (Ac 11,22)

« Après bien de l’agitation et une discussion assez vive engagée avec eux par Paul et Barnabé, il fut décidé que Paul, Barnabé et quelques autres des leurs monteraient à Jérusalem auprès des apôtres et des anciens pour traiter de ce litige. Eux donc, après avoir été escortés par l’Église, traversèrent la Phénicie et la Samarie, racontant la conversion des païens, et ils causaient une grande joie à tous les frères. Arrivés à Jérusalem, ils furent accueillis par l’Église, les apôtres et les anciens, et ils rapportèrent tout ce que Dieu avait fait avec eux. » (Ac 15,2-4)

« Dans les villes où ils passaient, ils transmettaient, en recommandant de les observer, les décrets portés par les apôtres et les anciens de Jérusalem. » (Ac 16,4)

Ainsi, Saül, qui arrêtait les croyants, vient à Jérusalem, auprès des apôtres pour y chercher leur approbation :

« Arrivé à Jérusalem, il (Saül/Paul) essayait de se joindre aux disciples, mais tous en avaient peur, ne croyant pas qu’il fût vraiment disciple. Alors Barnabé le prit avec lui, l’amena aux apôtres et leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur, qui lui avait parlé, et avec quelle assurance il avait prêché à Damas au nom de Jésus. Dès lors il allait et venait avec eux dans Jérusalem, prêchant avec assurance au nom du Seigneur. » (Ac 9, 26-28)

« Ensuite, après trois ans, je montai à Jérusalem rendre visite à Céphas et demeurai auprès de lui quinze jours : » (Ga 1,17)

« Ensuite, au bout de quatorze ans, je montai de nouveau à Jérusalem avec Barnabé et Tite que je pris avec moi. » (Ga 2,1)

La centralité de Jérusalem pour les chrétiens se remarque durant les voyages de Paul notamment avec la quête de solidarité qu’il organise pour sa communauté :

« Paul avait en effet décidé de passer au large d’Éphèse, pour ne pas avoir à s’attarder en Asie. Il se hâtait afin d’être, si possible, le jour de la Pentecôte à Jérusalem. » (Ac 20,16)

« par la vertu des signes et des prodiges, par la vertu de l’Esprit de Dieu : ainsi, depuis Jérusalem en rayonnant jusqu’à l’Illyrie, j’ai procuré l’accomplissement de l’Évangile du Christ, » (Ro 19,15)

« Mais maintenant je me rends à Jérusalem pour le service des saints : car la Macédoine et l’Achaïe ont bien voulu prendre quelque part aux besoins des saints de Jérusalem qui sont dans la pauvreté. » (Ro 15,25-26)

« Et une fois près de vous, j’enverrai, munis de lettres, ceux que vous aurez jugés aptes, porter vos libéralités à Jérusalem ; » (I Co 16,3)

C’est aussi l’incrédulité de Jérusalem que mentionne Paul/Saul dans son discours autobiographique, devant la foule, après son arrestation au Temple :

« " De retour à Jérusalem, il m’est arrivé, un jour que je priais dans le Temple, de tomber en extase. Je vis le Seigneur, qui me dit : "Hâte-toi, sors vite de Jérusalem, car ils n’accueilleront pas ton témoignage à mon sujet. " » (Ac 22,17-18)

Nous retrouvons également la mention de Jérusalem dans les discours de Paul devant le gouverneur romain et devant le roi Agrippa, rapportés aux chapitres 25 et 26 du livre des Actes.

Enfin, il y a la vision allégorique et eschatologique de Jérusalem

« Il y a là une allégorie : ces femmes représentent deux alliances ; la première se rattache au Sinaï et enfante pour la servitude : c’est Agar car le Sinaï est en Arabie et elle correspond à la Jérusalem actuelle, qui de fait est esclave avec ses enfants. Mais la Jérusalem d’en haut est libre, et elle est notre mère ; car il est écrit : Réjouis-toi, stérile qui n’enfantais pas, éclate en cris de joie, toi qui n’as pas connu les douleurs ; car nombreux sont les enfants de l’abandonnée, plus que les fils de l’épouse. » (Ga 4,24-27)

« Mais vous vous êtes approchés de la montagne de Sion et de la cité du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste, et de myriades d’anges, réunion de fête, et de l’assemblée des premiers-nés qui sont inscrits dans les cieux, d’un Dieu Juge universel, et des esprits des justes qui ont été rendus parfaits. » (Hb 12,22-23)

C’est la description de Jérusalem comme cité de la fin des temps :

« Puis voici que l’Agneau apparut à mes yeux ; il se tenait sur le mont Sion, avec cent quarante-quatre milliers de gens portant inscrits sur le front son nom et le nom de son Père. » (Ap 14,1)

« Le vainqueur, je le ferai colonne dans le temple de mon Dieu : il n’en sortira plus jamais et je graverai sur lui le nom de mon Dieu, et le nom de la Cité de mon Dieu, la nouvelle Jérusalem qui descend du Ciel, de chez mon Dieu, et le nom nouveau que je porte. » (Ap 3,12)

« Je vis la Cité sainte, Jérusalem nouvelle, qui descendait du ciel, de chez Dieu ; elle s’est faite belle, comme une jeune mariée parée pour son époux. Il me transporta donc en esprit sur une montagne de grande hauteur, et me montra la Cité sainte, Jérusalem, qui descendait du ciel, de chez Dieu, avec en elle la gloire de Dieu. Elle resplendit telle une pierre très précieuse, comme une pierre de jaspe cristallin. » (Ap 21,1...11)

Cette vision manifeste pleinement le lien avec Jérusalem et son importance pour la communauté chrétienne puisqu’elle représente l’accomplissement final, la représentation du but de l’attente eschatologique.

 Jérusalem dans le Coran

Le nom de Jérusalem n’apparaît pas dans le Coran mais, selon une tradition islamique bien établie, c’est à Jérusalem que se réfère la sourate 17 du Coran qui évoque le voyage nocturne (isra) du Prophète :

« Gloire à Celui qui fit voyager son serviteur la nuit, du saint Sanctuaire au Sanctuaire éloigné dont nous avons béni les alentours afin de lui montrer quelques-uns de nos signes. »

La tradition musulmane qui s’est développée autour de ce verset est très prolixe. Elle rapporte que Mohamed fut réveillé en pleine nuit par l’ange Gabriel qui le conduisit vers une mystérieuse monture à tête de femme, rapide comme l’éclair, d’où son nom d’Al Buraq. Elle l’emmena à Ilya (arabisation d’Aelia Capitolina, nom donné par l’empereur romain Hadrien à Jérusalem en 135) où était le Temple sacré. De là, le prophète s’éleva jusqu’au ciel par une échelle de lumière, saluant au passage un grand nombre de prophètes. Parvenu au Lotus de la Limite, il put contempler Dieu et recevoir de Lui divers commandements. A son retour,il fit le récit de sa vision, décrivit le Temple de Jérusalem qu’il n’avait jamais vu , ainsi que les sept cieux qu’il avait traversés, les anges et les prophètes qu’il avait rencontrés .
Pour la tradition musulmane, il ne fait aucun doute que le voyage nocturne » a eu lieu de la Mecque à Jérusalem et de Jérusalem au ciel. Elle se partage entre un point de vue littéraliste et un point de vue mystique, selon lequel ce voyage aurait été purement spirituel.
La mosquée d’El Aqsa construite à Jérusalem vers 700 (après le dôme du Rocher 691), porte le nom du « sanctuaire éloigné » (masjid el aqsa). Lorsque La Mecque est devenue « la première qibla » c’est à dire le lieu de direction de la prière pour les musulmans du monde entier, cette identification a fait de Jérusalem le troisième lieu saint de l’islam, ce qui lui vaut en arabe le nom d’Al Qods( la Sainte) . Une prière à la Mecque vaut 100 000 prières, à Médine 1000 prières et à Al Qods 250 ou 500 prières : ainsi s’exprime la hiérarchie dans l’ordre de la sainteté spatiale de l’islam.

[1J.P. II « Redemptionis Anno » 20 avril 1984