Entre 1881 et 1921, on a dénombré près de 1.400 pogroms qui, de Kiev à Odessa et de Varsovie à Kichinev, ont probablement fait plus de 60.000 morts. Selon un scénario constant, après deux ou trois jours de déchaînement populaire, quand la violence risquait d’atteindre les quartiers non-juifs, la force armée arrivait pour ramener l’ordre.
Conséquence d’une situation de crise (assassinat du tsar Alexandre Il en 1881, révolution de 1905, guerre civile de 1917-1921) autant que d’un antisémitisme virulent, les pogroms marquent un tournant dans l’histoire des communautés de l’empire russe.
Avec l’appui tacite de la police et de l’armée, des ouvriers, des paysans, des employés se rejoignaient pour attaquer les maisons juives. Le gouvernement prenait ensuite prétexte des pogroms pour transformer les victimes en auteurs des troubles, et donc, pour limiter leurs droits (cf. les « Lois scélérates » de mai 1882, autorisant les expulsions des villages, et instituant un numerus clausus dans les universités russes) .
Dès 1881, l’émigration vers l’Europe occidentale, les États-Unis et la Palestine fut une réaction aux pogroms, tout comme l’espoir mis par les Juifs russes dans le communisme soviétique en 1917.
Tandis qu’en Europe occidentale, !’Émancipation a permis aux Juifs de s’assimiler, l’horreur des pogroms a favorisé en Europe de l’Est la naissance des premiers projets sionistes (avant celui de Theodor Herzl) - et des premiers groupes d’autodéfense.
A-M. D.