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Ame

Tandis que l’hébraïsme s’interroge sur ce qui est saint et ce qui ne l’est pas, le dualisme corps/âme est une conception grecque, qui n’a influencé le Judaïsme qu’à partir de l’époque hellénistique (- IIIe siècle). Pour la pensée hébraïque, l’être vivant est un corps animé par un souffle, et les deux ne se distinguent que dans la mort. L’âme et le corps ne sont pas en opposition, mais en perpétuelle interaction.

Du latin « anima », souffle, âme peut être traduit de manière équivalente en hébreu par trois noms qui indiquent des niveaux différents :

  • « NeFeCh », dont la racine signifie « exhaler, souffler, reprendre haleine, (traduit dans la Septante par « psyché »). Réceptacle de la vitalité, la NeFeCH s’applique à la vie animale dans son ensemble - d’où l’affirmation que « la NeFeCH de toute chair, c’est son sang, (Lv XVII, 14). Elle est ce qui définit la personnalité biologique (physiolo­gie et instincts). Si le ChaBaT est le temps d’un « supplément d’âme », d’un autre souffle, c’est en référence au verset de l’Exode (XXXI, 17) inclus dans le KiDOUCh du ChaBaT : littéralement « ... et le septième jour, D. a cessé / de créer / et a soufflé » (VaYiNaFaCH). « NeFeCh » est aussi le siège des affects et de la pensée (« ... car tu connais le NeFeCh de l’étranger,, Ex XXIII, 9 ; « ... selon son bon plaisir BeNaFChO » (Ps 105, 22).
  • « ROUaH » est l’esprit d’une personne, sa pensée (traduit dans la Septante par « pneuma » ou « pnoé »). NeFeCH et ROUaH sont des fonctions liées à la personnalité, donc marquées par la finitude.
  • « NeChAMaH », souffle, haleine, est donnée par D. (ce qui n’est pas toujours le cas de NeFeCH) : « Il souffla dans ses narines une NeChAMa de vie » (Gen II, 7) ; « La NeChaMaH du Tout-Puissant me ranime » (Job XXXIII, 4). Il s’agit de l’étincelle de lumière divine sertie dans la NeFeCh et dans la ROUaH, témoin de « l’image de D. » selon la­quelle l’humain est créé. Comme telle, pour le Judaïsme, elle n’est pas entachée par « le péché originel », ce que la liturgie quotidienne confirme : « (... ) l’âme que Tu as mise en moi est pure ». Cependant, contrairement aux deux premiers aspects de l’âme, celui-ci peut être refoulé ou nié par l’homme. Son retour dans l’âme est alors le résultat de la TeShouVa (voir Pénitence).

Deux degrés supérieurs - ou intérieurs - de la NeChaMaH sont énumérés dans la Kabbale

  • HAYaH (d’une racine qui signifie « vivre », mais qui ne s’applique pas aux végétaux). Au sens métaphorique, est « vivant » tout homme qui étudie et pratique la Torah, qui en « vit ».
  • YeHiDaH, l’Unique, à la tangente du divin et de la vocation humaine.

Pour le Judaïsme, la sauvegarde de la vie (PIKOUaH NeFeCh) est un impératif absolu qui prime sur la sainteté du temps (ChaBaT et fêtes) et de l’espace (le Temple) : c’est dans l’âme humaine que la sainteté divine transcendante devient Présence, et c’est ce qui rend la vie précieuse.

Selon la mystique de la Kabbale, les niveaux de l’âme sont les degrés pour s’élever de la connaissance à la Restauration du monde, avec la ToRaH pour guide. L’âme est comparée à une lampe dont la mèche est allumée ici-bas par l’accomplissement des MiTSVot ; c’est alors qu’elle peut recevoir de l’infini Sa lumière. Comme le corps, l’âme doit manger et se vêtir : la ToRaH est sa nourriture, et la MiTSVa son vêtement.

Dans la Bible hébraïque, l’immortalité de l’âme n’est pas clairement affir­mée (cf l’expression éloquente de « NeFeCh met », âme morte, en Nombres VI, 6. Le terme sert d’ailleurs aussi à désigner un cadavre en Lv XIX , 28). Transmigration, métempsychose ou réincarnation, la doctrine de l’immortalité de l’âme, mentionnée pour la première fois dans les livres de Daniel et des Maccabées, confirmée dans la MiChNa (San. 10 1), est l’un des articles de foi de Maïmonide. C’est l’affirmation ultime de la perfectibilité humaine, comme du retour de l’âme - étincelle divine - à son Lieu de lumière.