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Michel Remaud : "Paroles d’Évangile, paroles d’Israël"

Mise à jour 9 janvier 2013 : Le livre est à nouveau disponible !

Paru 23 novembre 2012, il était épuisé et en réimpression avant Noël.

Nous ne pouvons que vous recommander la lecture du dernier livre de Michel Remaud : nouveaux venus dans le dialogue judéo-chrétien, dans la lecture juive des écritures ou déjà initiés.

Comme l’écrit Jean Massonnet dans sa recension Le lecteur chrétien non familiarisé avec la tradition juive pourra y découvrir toute une série de perles inattendues, qui lui montreront que les Évangiles plongent dans un milieu qui leur est familier et qui, pour une bonne part, les inspire, car la nouveauté du Christ s’y enracine. … Ceux qui ont déjà une certaine connaissance du judaïsme pourront y trouver de quoi enrichir ou confirmer leurs convictions.

Recension de Jean Massonnet suivie de la présentation du livre.

Michel Remaud, Paroles d’Évangile, paroles d’Israël,
Editions Parole et Silence, novembre 2012.
156 pages, 15 €

Dans cet ouvrage de 156 pages, Michel Remaud a rassemblé, à partir d’une suggestion qui lui a été faite, une série d’articles courts, 60 en tout, dont le contenu général est bien défini par le titre : Paroles d’Évangile, paroles d’Israël. La plupart de ces réflexions sont reprises de la revue Feu et Lumière. Les cinq derniers (numéros 56 à 60) ont paru sur le site d’Un écho d’Israël.

Le style est simple et limpide. Le lecteur chrétien non familiarisé avec la tradition juive pourra y découvrir toute une série de perles inattendues, qui lui montreront que les Évangiles plongent dans un milieu qui leur est familier et qui, pour une bonne part, les inspire, car la nouveauté du Christ s’y enracine. Ce petit ouvrage ne mérite pourtant pas la qualification qui accompagne certains titres en guise d’encouragement au profane : « pour les nuls ». Ceux qui ont déjà une certaine connaissance du judaïsme pourront y trouver de quoi enrichir ou confirmer leurs convictions. Enfin, pour ceux qui ont la possibilité d’aller vérifier directement dans les sources, la liste des références en fin d’ouvrage leur dira où aller chercher.

Nombre d’expressions ou récits des Évangiles ou plus largement du Nouveau Testament peuvent sembler une pure nouveauté apportée par Jésus ; d’autres interrogent le lecteur par leur caractère paradoxal ou énigmatique. Replongés dans leur milieu juif d’origine, ces passages y trouvent un sens confirmé et parfois un éclairage insoupçonné. Quelques exemples :

  • Que signifie ce « trou d’aiguille » (Mt 19,24) par lequel un riche devrait passer pour entrer dans le royaume de Dieu ?
  • Jésus déclare aux femmes qui le suivent sur le chemin du Calvaire, « Si l’on traite ainsi le bois vert, qu’en sera-t-il du bois sec ? » (Lc 23,29-31). Est-ce vraiment une malédiction ?
  • Une femme atteinte d’hémorragies est persuadée que si elle parvient à toucher la frange du vêtement de Jésus, elle sera guérie ; et c’est ce qui lui arrive. Mais pourquoi précisément « la frange » ?
  • Prête-t-on suffisamment attention à cette demande du Notre Père : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel » ?
  • La béatitude « Heureux ceux qui pleurent » (Mt 5,5) est illustrée par le rire paradoxal de Rabbi Aqiva.
  • Est-ce un hasard si Zachée porte précisément ce nom ?
  • etc. !

Ces épisodes ont à première vue un caractère anecdotique ; ils ne le sont pas quand on y réfléchit. Là encore, quelques exemples. À partir de l’espérance « qui rend pur » (1 Jn 3,2-3) il est possible de renvoyer à une déclaration de Rabbi Aqiva qui permet de dépasser les accusations porteuses de mépris à l’égard d’un judaïsme qui serait sclérosé dans le ritualisme (p. 27-28). L’épouse de Rabbi Méir, Beruria, fait comprendre à son mari, à partir d’un même mot qui peut signifier « pécheur » ou « péché » (Ps 104,35) qu’il ne faut pas prier pour que meurent les pécheurs, mais pour que disparaisse le péché (p. 95-96). Voilà une excellente clé de lecture donnée aux chrétiens rebutés par les expressions de violence et de vengeance contenues dans les psaumes. La déclaration de Jésus « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Mt 22,15-22) est plus qu’un simple principe de bonne laïcité. Elle prend une tout autre ampleur quand on la mesure à une réflexion juive sur Adam créé à l’image de Dieu (p. 105-106).

Cet ouvrage de Michel Remaud donne envie d’en connaître plus. « Va et étudie » disait Hillel à un impertinent qui voulait apprendre la Tora le temps qu’il se tenait sur un pied. Une hirondelle ne fait pas le printemps. De même, un écho de la tradition juive dans le Nouveau Testament pris isolément n’est pas une preuve. Mais à mesure qu’un chrétien découvre la richesse des relations entre les deux domaines, il approfondit la compréhension de son christianisme et comprend combien est justifiée sa reconnaissance envers le peuple qui garde vivante la tradition au sein de laquelle son espérance a pris naissance.

Jean Massonnet

Quatrième de couverture :
Pour la plupart des chrétiens, la tradition juive a longtemps été un continent inconnu. Le lecteur qui pénètre pour la première fois dans ce monde éprouve une double surprise, en découvrant à la fois la richesse de cette tradition et sa parenté avec le Nouveau Testament. L’Évangile n’a pas poussé sur un sol vierge. Ses auteurs étaient imprégnés d’une culture qui s’est développée en Israël depuis l’antiquité et dont le peuple juif d’aujourd’hui reste le gardien. La fréquentation de la littérature rabbinique fait saisir de quelle manière les écrits apostoliques appartiennent au même monde et restent souvent mal compris, voire hermétiques, s’ils ne sont replongés dans leur milieu d’origine.
Les chrétiens peuvent aujourd’hui entrevoir les multiples aspects de la relation qui ne cesse d’unir l’Église au peuple dont elle est née. La nécessité de cette découverte ne relève pas seulement d’un devoir de justice envers un peuple juif diffamé pendant des siècles. Elle se manifeste aussi, à l’expérience, par sa fécondité : l’Évangile ne révèle son contenu et toute sa portée s’il n’est mis en relation avec l’univers où il est né.
Ces brefs chapitres invitent ainsi les chrétiens à mieux connaître leurs propres origines et le peuple au sein duquel, d’abord, a été prêché l’Évangile.

Michel Remaud, prêtre catholique, docteur en théologie, dirige à Jérusalem l’Institut Albert Decourtray (Institut chrétien d’études juives et de littérature hébraïque). Il a reçu en 2010 le prix de l’Amitié judéo-chrétienne de France.