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Florence Taubmann : Pâque juive et Pâque chrétienne

Quand les Églises chrétiennes célèbrent le Jeudi saint, il est essentiel de rappeler que Jésus et ses disciples sont réunis à Jérusalem pour fêter Pessah. L’évidence doit toujours être explicitée, sans quoi ce que nous appelons cène, ou eucharistie, semble tomber du ciel, au lieu d’être éclairée par le sens profond et fondateur de la Pâque juive. Or ce sont bien les mots libération, passage, sortie de l’esclavage, qui nous sont donnés en héritage, et qui sont sans cesse réactualisés dans le judaïsme par la lecture des récits, les commentaires, la liturgie, le chant.

Les chrétiens doivent donc réaliser qu’aujourd’hui encore, sur toute la terre, là où résident des juifs, la haggadah de Pessah retentit dans les maisons, non seulement pour mémoire familiale et transmission entre les générations, mais au bénéfice de toutes les nations.
C’est lors de ce repas, au cœur de cette parole de salut et de vie, que Jésus prit le pain, le vin, en rendit particulièrement grâce, et leur donna ce sens qui les transformera, pour ses disciples réunis, puis pour tous les chrétiens, en Pain et Vin de Vie Éternelle. Mais il y faudra le sceau de la mort ignominieuse sur la croix, non par goût du sacrifice, mais par fidélité à Dieu et à la vérité, car «  il n’est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. ».

La libération de la Pâque chrétienne est donc à la fois le même et un autre passage que celui de l’esclavage à la liberté. Ou plus exactement elle explicite, à destination de toutes les nations, que ce passage offert dans l’Alliance est toujours celui de la mort à la vie, de la fatalité à l’espérance.

Ce sont toutes les générations qui doivent vivre la libération d’Égypte, nous rappelle la tradition juive. Ce sont tous les humains qui peuvent vivre la résurrection de l’être en Jésus le Christ, nous dit la foi chrétienne. Pâque dans le temps, Pâque dans l’espace, chacune a son universel retentissement ! En faisant mémoire de l’événement qui l’a maintenu en vie à travers tous ses exils, ses épreuves, ses terreurs, le peuple juif en propose le récit à tous les opprimés, tous les esclaves, tous les humiliés de la terre ! On sait combien il fut chanté dans les negro spirituals et les gospels. En célébrant le relèvement, le retour à la vie, de Cet Homme dont l’amour est plus fort que la mort, les chrétiens portent la promesse, - voire l’exigence, de résurrection auprès de tous ceux qui s’ouvrent à la Bonne Nouvelle.

Cet Homme, Jésus de Nazareth, était juif. Il l’est encore, ressuscité pour nous inviter à entrer dans l’Alliance, non pas à la place du peuple juif, mais à sa suite, auprès de lui, pour témoigner du Dieu Vivant d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob, Dieu de justice, d’amour et de miséricorde.

Pasteur Florence Taubmann , présidente de l’Amitié Judéo-Chrétienne de France, 24 mars 2012