Sa famille fut arrêtée à Riom le 7 octobre 1943. Son épouse Laure, sa fille Juliette, son fils Jean-Claude, son gendre Robert Boudeville furent déportés aussitôt. Seul Jean-Claude devait survivre.
Jules Isaac qui avait échappé par hasard à l’arrestation, trouva divers refuges, d’abord dans les environs de Riom, puis à Royat près de Clermont-Ferrand, enfin dans une ferme dans le Berry, auprès de Germaine Bocquet. Originaire de Brive-la-Gaillarde, celle-ci s’était engagée dans la Résistance dès le début de l’Occupation, dans le réseau d’Edmond Michelet, comme agent de liaison. Elle s’employait aussi à cacher des juifs, à leur fournir des faux-papiers et des familles d’accueil à Limoges et à Toulouse. Cheftaine scoute, elle profita de camps organisés dans les Alpes pour faire passer des enfants en Suisse par le col de Balme à plus de 2000 mètres d’altitude. Lorsqu’Edmond Michelet fut arrêté en février 1943, elle se réfugia à Clermont-Ferrand. Elle fut chargée d’accueillir Jules Isaac à la campagne, près d’Issoudun, dans la ferme de Prault de sa grand-mère, puis à la suite d’une alerte, dans le petit village de Levroux dans l’Indre, grâce à sa belle-famille.
Germaine Bocquet fait partie des Français qui, par leur générosité et leur courage, ont sauvé l’honneur de la France et contribué à enrayer la machine de mort du nazisme.
Surtout, en cachant Jules Isaac, en lui permettant de continuer à travailler dans la clandestinité à son manuscrit qui devait aboutir à Jésus et Israël, comme Laure le lui avait recommandé dans un billet envoyé de Drancy, Germaine Bocquet fut un élément déterminant sans le savoir de l’œuvre de réconciliation de Jules Isaac. Elle lui fournissait des livres qu’elle pouvait trouver notamment à la bibliothèque du couvent d’Issoudun ; Elle fut aussi sa première lectrice, découvrant ainsi à travers le travail d’historien de son protégé, les racines chrétiennes de l’antisémitisme et elle prit conscience des conséquences de « l’enseignement du mépris ». Ce fut pour elle une découverte douloureuse. Il lui lisait les pages qu’il rédigeait, tout en se préoccupant de ne pas la choquer : « Cela ne heurte-t-il pas trop votre conscience chrétienne ? N’ai-je pas la dent trop dure ? » (Voir le témoignage de Germaine Bocquet, « Jules Isaac dans la clandestinité », Cahiers de l’Association des amis de Jules Isaac, vol. III, Témoignages, Aix-en-Provence, 1981).
Au sortir de la clandestinité à la Libération, Jules Isaac fut dès 1947, l’âme de la Conférence de Seelisberg. En 1948, il fonda l’Amitié Judéo-Chrétienne de France, et la même année il publia le livre qui allait secouer les consciences chrétiennes, Jésus et Israël.
18 juillet 2023