Cela nous vaut deux beaux messages convergents, l’un du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, « Joyeux Noël », l’autre de l’Archevêque de Paris, le Cardinal André Vingt-Trois, « Hag Hanoukka Sameah ». Et l’éditorial du Rabbin Delphine Horvilleur insiste sur cette concomitance de date : « Vivre simultanément les deux fêtes, cette année, est comme une invitation pour les uns et les autres à revisiter ce qui nous rapproche et nous distancie. »
La suite est faite, répétons-le, d’apports les plus divers. Soulignons d’emblée le riche entretien de Mgr P. d’Ornellas, Archevêque de Rennes, avec J-F. Bensahel, Président de la synagogue de la rue Copernic (Paris), qui porte sur l’événement fondateur que fut la déclaration Nostra Aetate (1965) de Vatican II. Avec force, J-F. Bensahel s’élève contre une interprétation de certains de ses coreligionnaires qui estiment que « les rapprochements entre l’Église et le Judaïsme sont le fruit d’un calcul politique ou circonstanciel. » « C’est une grave erreur », souligne-t-il : « il s’agit d’une démarche spirituelle, théologique, religieuse. C’est celle-ci qui porte celle-là. Et pas l’inverse. » Et si l’on en veut une preuve, il suffit de lire, pour s’en convaincre, leur livre d’entretiens, Juifs et Chrétiens, frères à l’évidence. La paix des religions, éd. Odile Jacob, 2015 [cf. Sens, n°405, mars-avril 2016, p. 173-175].
Des articles d’universitaires se font l’écho des recherches actuelles sur les origines du Christianisme, notamment sur la place et le rôle, de plus en plus marginalisés, des Judéo-Chrétiens face aux Rabbis pharisiens du Talmud (Dan Jaffé), ou bien encore sur la remise en cause, par Israël Yuval, de la vision classique de la relation Judaïsme-Christianisme comme respectivement religion-mère et religion-fille, au profit d’un modèle de « deux sœurs en conflit ».
Mais l’histoire contemporaine n’en est pas pour autant oubliée, avec Édouard Husson qui reconsidère à nouveaux frais la légende noire de Pie XII, avec Jonas Moses-Lustiger, petit-fils d’Arno Lustiger, cousin de l’Archevêque de Paris : « Un Kaddish pour le Cardinal ». Il faudrait aussi évoquer la leçon d’exégèse du Rabbin Marc-Alain Ouaknin, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », ou bien la méditation de David Isaac Haziza sur le verset du Psaume 22, « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-Tu abandonné ? », mots de douleur prononcés, selon les Évangiles, par Jésus sur la croix, et bien d’autres rubriques encore. Un dossier très riche à étudier dans toutes ses composantes.
Bruno Charmet