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LE CONSUL, par Salim BACHI

Roman
Éd. Gallimard, 2015, 180 p., 17,50 €

Salim Bachi est né en 1971 à Alger. Après une enfance à Annaba (anciennement Bône) et un séjour en France en 1995, il revient en 1997 à Paris à la Sorbonne où il poursuit des études de lettres. Son premier roman en 2001 Le Chien d’Ulysse lui vaut le Goncourt du premier roman. Le Consul est le dixième ouvrage de cet auteur considéré comme un auteur important.

Salim Bachi prend pour sujet de son roman un personnage historique, le consul du Portugal Aristides de Sousa Mendes à Bordeaux en juin 1940 qui, à la veille de sa mort, revient sur les grands épisodes de sa vie. Il choisit d’écrire une longue lettre que le consul adresse à Andrée, sa maîtresse devenue sa seconde épouse, ce qui lui permet de nombreux allers et retours sur le passé, voire des répétitions, au fil du déroulement de la pensée. Cette forme n’est pas une coquetterie littéraire de l’auteur, elle sert en effet le sujet en permettant de cerner au plus vraisemblable la personnalité d’Aristides de Sousa Mendes. Le livre se lit facilement avec de longues phrases qui rythment le déroulement de la pensée.

Quelques points forts du livre
Les événements de juin 1940 sont au cœur du livre : l’invasion de la France, la désorganisation, l’exode des populations qui affluent de partout, fuyant vers les pays restés neutres. Les mots sont très durs pour rappeler les décisions des responsables français. Le consul du Portugal à Bordeaux est alors très sollicité par de nombreux Juifs, dont le rabbin Kruger, et des réfugiés de toute l’Europe, désireux d’obtenir des visas pour sortir de France. Mais une circulaire du 11 novembre 1939 « restreignait, interdisait, proscrivait la délivrance de visas aux étrangers à la nationalité indéfinie… » (p. 27).
Devant ce blocage officiel, Aristides de Sousa Mendes choisit la désobéissance. Salim Bachi insiste sur la difficulté de cette prise de décision pour un aristocrate imprégné de traditions, attaché à son pays. Et pourtant très rapidement les événements le bousculent, il délivre en quelques jours le plus possible de visas, jusqu’à ce qu’il soit relevé de ses fonctions par Salazar. Il a alors conscience d’avoir agi contre « l’homme-machine », « l’homme-dieu » (pp. 139-140).
Salim Bachi montre un homme de foi, attaché à un christianisme vivant, aux valeurs humaines et familiales, malgré une vie privée compliquée. Il décrit un homme fort dans l’adversité, qui meurt dans la disgrâce et la pauvreté, sans regretter la désobéissance héroïque qui l’a plongé, lui et sa famille, dans le plus grand dénuement.

Ce livre, édité aux éditions Gallimard comme roman, s’inscrit dans un cycle de plusieurs biographies. Son auteur prend soin de citer ses sources d’information, mais ne fait pas un livre d’histoire. Le lecteur saisit parfaitement ce qui intéresse Salim Bachi : suivre Aristides de Sousa Mendes confronté à des situations hors du commun, et surtout rentrer dans sa pensée, en accompagnant tous les méandres de ses démarches.

Un livre juste et fort qui, sans être de l’histoire, aide à la comprendre.

Paule MARX