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7 octobre 2023-7 octobre 2025

Éditorial de Jean-Dominique DURAND-Président de l’AJCF, Joël THIERRY- Secrétaire général de l’AJCF, Pascal de MENTQUE-Membre du comité directeur de l’AJCF

Le 7 octobre 2023, il y a deux ans, en ce jour saint de Shabbat et de Simhat Torah, les islamistes du mouvement Hamas se sont livrés à un massacre génocidaire d’une barbarie inouïe, en terre d’Israël, transformant ce jour de fête en jour de deuil.

Deux ans après, les fêtes de Tichri 5786 restent marquées par l’angoisse et l’attente de la libération des 48 otages, toujours aux mains des terroristes du Hamas et de leurs complices, et de la fin du calvaire des habitants de Gaza.

Deux ans après nous sommes dans le temps d’un deuil différé pour les otages assassinés dont les corps toujours retenus à Gaza n’ont pas été rendus à leur famille.

Depuis deux ans, nous sommes dans le temps de la mémoire des 1.188 morts, hommes, femmes, enfants, vieillards, massacrés après avoir subi des tortures, les femmes violées et éventrées.

Ce pogrom hante nos jours et nos nuits à jamais.

Ce temps de deuil différé et ce temps de mémoire portent le passé au présent et nous obligent pour l’avenir.

Zakhor al Tichkah « Souviens toi, n’oublie jamais »

Pendant longtemps, on a cru qu’il suffisait de résister à l’antisémitisme en pensée, en faisant mémoire de la Shoah pour se rappeler que ces pensées même secrètes pouvaient mener ou laisser faire jusqu’au pire des crimes. Et puis il faut lutter à nouveau contre l’antisémitisme en paroles et en actions, en guettant et condamnant tout propos, inscriptions et agressions de tout type, nous rappelant les années les plus sombres de notre histoire ou niant la réalité de la Shoah.

Mais ne sommes-nous pas dans une tragédie sans fin, entretenue depuis le 8 octobre par une déferlante d’antisémitisme, de haine totale contre les juifs, attisée par des responsables politiques, dont des parlementaires, colportée et amplifiée grâce aux réseaux sociaux ?

Ne sommes-nous pas dans une souffrance sans fin face aux manipulations du vocabulaire et des concepts, faisant passer les victimes pour des bourreaux, les terroristes pour des résistants, le tortionnaire pour un héros ?

Ne sommes-nous pas dans une souffrance sans fin, lorsque de si nombreux intellectuels, artistes et même sportifs, si totalement silencieux le 8 octobre et les jours suivants, devant les cris de souffrance des suppliciés et les hurlements de joie des tortionnaires, se transforment en boycotteurs même des artistes, écrivains et sportifs juifs ?

Ne sommes-nous pas dans une souffrance sans fin, lorsque l’on cherche à transformer en « génocide » une guerre évidemment cruelle, dévastatrice, comme toute guerre, mais de survie d’un État que l’on veut rayer de la carte ?

En 1982 - il y 43 ans ! -, un grand acteur de l’amitié judéo-chrétienne, le père oratorien Jean Dujardin écrivait à propos d’une intervention d’Israël au Liban, contre des organisations terroristes :
« Nous nous découvrons impuissants au niveau d’une action politique immédiate, mais nous sommes gravement responsables de l’information de l’opinion sur ces problèmes. Devant le spectacle atroce des victimes de la guerre, nous pleurons et nous demandons spontanément que justice leur soit rendue. Mais voilà qu’Israël dont nous avons longtemps admiré le courage, parce qu’il l’emporte militairement, mis et lui seul au ban des accusés. Les Mass Media n’hésitent plus à lui appliquer des épithètes infamantes, à l’accuser des mêmes crimes dont le peuple juif a été victime du fait des Nazis. Qu’on ose cette comparaison au mépris d’une connaissance historique élémentaire. Quel scandale ! […] Nous ne pouvons admettre ce langage pour nous donner à nouveau bonne conscience. L’antisémitisme latent y a déjà trouvé son compte. » (« Des événements qui nous déchirent », dans Sens, 1987, n° 7/8, p. 165).

Face à la vague de violence antisémite qui déferle, aux mensonges et manipulations qui la nourrissent et la justifient, nous espérons que l’ordre républicain saura, comme il le doit et le prétend, protéger les juifs de France ou d’ailleurs, en réprimant sans trembler tous les crimes pouvant être commis, conformément à la loi et sans minorer ni tolérer le moindre délit, dont on sait à quoi il peut aboutir quand il n’est plus réfréné.

Depuis cette rentrée, les appels au boycott se multiplient à grande échelle dans tous les domaines, culturels, médiatiques, sportifs et deviennent quotidiens et innombrables. La question même de décider si Israël doit être exclu (comme à l’Eurovision et dans des compétitions sportives) devient légitime, et ce n’est que le vote de majorités de plus en plus fragiles qui peuvent encore éviter cette infamie ! Aujourd’hui, il n’est pas besoin d’un nouveau « Statut des Juifs » pour exclure de la société et promettre à une mort sociale, voire à une mort tout court, des citoyens parce qu’ils sont juifs : une simple omission suffit. On n’affiche plus (ou pas encore) des panneaux « Interdit aux Juifs » devant des lieux publics, mais on y revient de fait. Les enfants juifs ne sont pas exclus de l’Éducation nationale, mais de nombreux établissements scolaires publics ne les accueillent plus, renonçant à assurer leur sécurité.

Au regard des événements les plus récents qui font craindre désormais le pire, l’AJCF soutient depuis longtemps la demande exprimée par le Grand Rabbin Haïm Khorsia, de faire de la lutte contre l’antisémitisme une grande cause nationale.

L’Amitié Judéo-Chrétienne est née au lendemain de la Shoah, de la volonté de Jules Isaac de combattre l’antijudaïsme chrétien qui, en pensée, en parole, par action et par omission, avait fait germer et grandir l’antisémitisme social et politique qui fut le bras armé d’une haine durablement entretenue contre les juifs parce que juifs. La parole et l’énergie d’un homme seul, ayant perdu les siens à Auschwitz mais ayant choisi de tendre la main plutôt que de haïr, avait alors permis de convertir le regard chrétien sur les juifs et le judaïsme, au moins sur son passé.

Aujourd’hui, la vocation de l’AJCF demeure dans une actualité qui nous oblige à renouveler ce cri du cœur, pour que les mêmes mensonges n’amènent pas aux mêmes erreurs et aux mêmes omissions, qui donnent une justification à ceux qui n’attendent que notre silence et notre indifférence pour accomplir de nouveaux crimes contre nos concitoyens juifs, avant de s’attaquer à tous les autres qui ne se soumettront pas.

Du 5 au 7 octobre 2025, l’Amitié Judéo-Chrétienne se doit d’être présente aux rassemblements organisés à la mémoire des victimes du pogrom du 7 octobre, partout où de tels rassemblements sont organisés :
Pour exiger la libération des otages encore détenus à Gaza par le Hamas
Pour dire STOP à la haine antisémite
Pour affirmer notre amitié et notre solidarité avec les juifs où qu’ils se trouvent, près de nous, comme en Israël

Dans l’espérance d’une paix dans la vérité et la justice, fondée sur la reconnaissance mutuelle des peuples et des États de la région.

« On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on n’apprendra plus à faire la guerre » (Is 2, 4).

5 octobre 2025